II. 1953-1968 : LA DESTALINISATION : naissance de la liberté d'expression ?


Nikita Khrouctchev

C’est Nikita Khrouchtchev qui succède au « Petit père du peuple » en 1953. Très vite il met en place la déstalinisation. Cette opération consiste à mettre fin à la terreur stalinienne et au culte de la personnalité de l'ancien dirigeant. Voici cinq dates importantes de cette période :
  • 10 mars 1953 : arrestation de Beria (chef de la police sous Staline)
  • Juillet 1953 : Khrouctchev devient premier secrétaire du Parti.
  • 1954 : Réorganisation de la police politique. Création du KGB.
  • Février 1957 : Réhabilitation des déportés de Staline.
  • 1961 : Les effigies et nom de Staline sont retirés des lieux publics. Stalingrad devient Volgograd, et la dépouille de Staline est retirée du mausolée de la place rouge (où se trouve Lénine).
La réhabilitation des déportés permet à Soljénitsyne de revenir du Goulag, il raconte son exéprience dans Une Journée d’Ivan Dessinovitch. On suit ce prisonnier lors d’une journée habituelle : c’est l’hiver et Chouklov doit se lever à cinq heures du matin pour travailler. Les scènes décrites sont dures, et le froid est omni-présent, on comprend d’ailleurs sa puissance lorsqu’on nous dit « Il ne sentait plus ses mains. Pour les réchauffer il les plongea dans l’eau froide ». Les conditions de travail son si rudes que Chouklov rêve d’ « attraper le mal pour deux semaines ou trois », afin de pouvoir aller à l’hôpital. Ce livre est le premier ouvrage de Soljénitsyne, il commence à l’écrire dans les années 50 (à l’époque où se déroule l’histoire), alors que lui-même est au Goulag. 
Alexandre Soljénitsyne

C’est Nikita Khrouchtchev lui-même qui permet la publication de ce livre en 1962, dans la revue littéraire Novy Mir. C’est une véritable première, aucun témoignage du Goulag n’a jamais été publié avant. Viendront beaucoup plus tard les Récits de la Kolyma décrivant également la vie au Goulag. Lui-même y avait été envoyé pour avoir contesté le pourvoir de Staline.



" Des centaines de gens répétaient tous le même mot dans un chuchotement : les queues. Un chef plein de sagesse, connaissant la psychologie des détenus, avait ordonné de distribuer en même temps soit les têtes, soit les queues de harengs. On a bien souvent discuté des mérites respectifs des unes et des autres: les queues, semblait-il, contenaient plus de chair, mais les têtes, elles, donnaient bien plus de plaisir. Le processus d'absorption de la nourriture durait le temps de sucer les ouïes, de ronger l'intérieur. Le poisson nettoyé était loin de faire l'unanimité car on le préférait avec les arêtes et la peau. Mais le regret que ce ne fût pas des têtes, ce jour-là, ne dura qu'un instant et disparut: les queues, c'était une réalité, un fait. De plus, le plateau se rapprochait, et avec lui le moment le plus angoissant: quelle serait la taille du morceau qu'on aurait? Car il n'était bien sûr pas possible de le changer, pas plus que de protester. Tout était entre les mains de la chance, une des cartes de ce jeu contre la faim. La personne qui coupe les portions de hareng sans y faire attention ne comprend pas toujours - ou a simplement oublié - que dix grammes de plus ou de moins, dix grammes évalués à l'oeil, peuvent conduire à un drame, sanglant quelquefois. Quant aux larmes, il est inutile d'en parler. Les larmes sont fréquentes; tout le monde les comprend, et on ne se moque pas de ceux qui pleurent.  "

Ce livre nous permet avec Une Journée d’Ivan Dessinovitch que le Goulag fut vécu de la même manière pour tout le monde, on y retrouve « l’hôpital tant désiré » ainsi que les traumatismes des détenus dont la fragilité psychologique est telle, qu’ils peuvent pleurer pour du hareng : « Les larmes sont fréquentes; tout le monde les comprend, et on ne se moque pas de ceux qui pleurent ». La manière de manger, est également la même dans les deux récits, bien que dans le premier Chouklov mange du pain, et dans le deuxième les prisonniers mangent du hareng, les deux livres nous disent que la façon de manger est très différente de celle que l'on avait avant (c'est à dire quand on était libre), que désormais on suçote petit morceaux par petits morceaux la nourriture et que l'on se concentre sur la sensation que l'on a dans la bouche, conscient que ce maigre repas est tout ce qu'on aura à manger.
Bien que Krouchtchev essaye de « déstaliniser » l’URSS, la propagande n’en reste pas moins grande, en effet comme au temps de Staline il y a une peur de contamination idéologique qui pourrait ruiner le système communiste.


Emma Tchokonte Kamga

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